L’INDUSTRIE PHARMACEUTIQUE :
SON MODE D’INFLUENCE ET SON FONCTIONNEMENT
Eric Joussemet
Trois pouvoirs se sont mobilisés ces deux dernières années pour agir en collaboration afin de développer une synergie sanitaire mondiale et régionale, au bénéfice de l’installation d’un scandale sanitaire et humain en Europe et tout particulièrement en France.
Ces pouvoirs sont : celui des élites médiatico-politiques, celui, médical, de structures hospitalières publiques, et enfin, celui de l’industrie pharmaceutique internationale.
Ces trois pouvoirs, pour des raisons parfois opposées et surtout catégorielles, militent tous dans le même sens. Leur intérêt propre et très loin de l’intérêt national.
L’industrie pharmaceutique a plusieurs origines. Les officines pharmaceutiques et la grande industrie chimique. Nous passerons sur le premier groupe qui a donné, généralement, de petites entités ou des entreprises liées aux cosmétiques. Les grands groupes actuels sont plutôt issus de groupes chimiques à la fin du deuxième conflit mondial.
Ces entreprises étaient des unités de diversification, comme l’industrie agroalimentaires, qui fonctionnaient de façon classique et avec des méthodes commerciales animées par la volonté de réussir et de se développer à l’échelle mondiale. Le toujours mieux et le toujours plus étaient ses deux dogmes. Les meilleurs salariés, les mieux payés et les plus compétents avec les chercheurs les meilleurs et les plus efficaces. Les bénéfices engrangés servant a développer la recherche interne et la qualité de sa production pour trouver de nouvelles molécules et de nouveaux produits. Les propriétaires de ces groupes étaient stables et relativement peu nombreux. Les méthodes commerciales se fondaient sur des méthodes classiques de conviction auprès des médecins : visite médicale, epu (1), expérimentations de phase 3 et 4, études, congrès et intéressements financiers et techniques etc. Ces méthodes commerciales se complétaient par une influence personnalisée auprès du monde politique : maires et députés-maires. (Les élites politiques étant au début souvent directeur des hôpitaux de leurs villes respectives). Les établissements hospitaliers étaient souvent le principal pourvoyeur d’emplois en local ; et les groupes pharmaceutiques créateurs de chaines de production au niveau des grandes communautés et régions avaient une influence notable sur l’emploi local. On imagine aisément l’influence exercée sur les structures politiques municipales et régionales.
Cette industrie, qui s’était fortement développée sur des dogmes de développement traditionnel, subit alors trois chocs qui l’obligèrent à se spécialiser et à se transformer radicalement ces vingt dernières années : ce furent la MONDIALISATION, la BOURSIFICATION, le 3/100 européen.
La mondialisation provoqua un regroupement des laboratoires afin de courir de plus en plus vite vers la taille financière critique. Ces regroupements provoquèrent une diminution des emplois et une spécialisation de la recherche. Les « block busters » devinrent de moins en moins nombreux, et les groupes abandonnèrent les médicaments non rentables pour eux, voire diminuèrent la commercialisation des produits non rentables sur certaines zones autour de la planète.
L’entrée exacerbée en bourse des groupes eut un impact plus violent encore. Les anciens actionnaires perdirent la primauté au bénéfice de groupes d’investisseurs comme les fonds de pensions. On vit la recherche des bénéfices à court terme devenir la règle et l’industrie pharmaceutique n’eut plus que des objectifs financiers a courts termes. On vit l’effondrement de la recherche interne au bénéfice de l’achat sur étagère de molécules découvertes par de petites unités parallèles, et commercialisées sous le nom des entreprises acheteuses. En fait, des coups de bourse… Les forces de vente diminuèrent, et les labos toujours à la recherche d’un cash-flow important pour acheter « la bonne affaires » commencèrent à vendre leurs sièges sociaux et leurs usines de production.
Le funeste 3/100 imposé par l’Allemagne lors de la création de l’Euro […] au seul bénéfice de l’industrie allemande et de ses banques, compléta violemment le point précédent. Il imposa des budgets étatiques de plus en plus réduits en Europe, et tout particulièrement dans le domaine de la défense et de la santé. On commença les premiers « plans hôpital » et on installa un esprit d’économie politique dans tous les pays européens, dont la France.
La troisième raison fut le funeste 3/100 imposé par l’Allemagne lors de la création de l’Euro ; cette règle d’économie au seul bénéfice de l’industrie allemande et de ses banques, compléta violemment le point précédent. Il imposa des budgets étatiques de plus en plus réduits en Europe, et tout particulièrement dans le domaine de la défense et de la santé. On commença les premiers « plans hôpital » et on installa un esprit d’économie politique dans tous les pays européens, dont la France. Ce fut l’hypertrophie obligatoire de l’utilisation des médicaments génériques et celle des consommables hospitaliers.
Les Etats occidentaux perdirent leurs compétences de fabrication, leur recherche et leurs emplois au bénéfice de deux types de producteurs : les laboratoires « génériqueurs » majoritairement hors hexagone et les nouveaux pays producteurs, comme la Chine et l’Inde qui développèrent ainsi très rapidement leurs compétences et leurs productions (les scandales des masques, aiguilles, seringues et produits médicamenteux de base lors du coronavirus nous le rappelèrent récemment).
Ces copies industrielles partirent toutes en majorité dans les pays à bas coûts salariaux ; en conséquence les Etats occidentaux perdirent leurs compétences de fabrication, leur recherche et leurs emplois au bénéfice de deux types de producteurs : les laboratoires « génériqueurs » majoritairement hors hexagone et les nouveaux pays producteurs, comme la Chine et l’Inde qui développèrent ainsi très rapidement leurs compétences et leurs productions (les scandales des masques, aiguilles, seringues et produits médicamenteux de base lors du coronavirus nous le rappelèrent récemment). Les volontés d’économie renforcèrent, grâce aux plans d’économie dirigés par les institutions étatiques, la réorganisation et la fermeture des hôpitaux ainsi que la suppression des postes infirmiers et médicaux. Ceci renforcé par la mise en place d’éléments organisationnels et financiers comme les structures obligatoires de la T2A et des GHT… La baisse de la qualité de l’offre sanitaire française fut flagrante. Les industriels s’adaptèrent et supprimèrent de leurs « portefeuilles produits » tous les produits efficaces mais anciens. Ils accélérèrent la création de silos thérapeutiques à moindre quantité de molécules mais à plus forte marge bénéficiaire dans des disciplines thérapeutiques rentables … Moins d’offre de choix de produits mais plus intéressants. Par contre, pour les industriels, le risque de survie face aux futures situations commerciales devenait préoccupant.
Ces nouvelles situations changèrent le mode d’influence exercé par l’industrie pharmaceutique auprès des décideurs politiques et médicaux.
La promotion par des réseaux importants de délégués médicaux commença à disparaitre ; une spécialisation des équipes avec des actions plus ciblées auprès des hommes et des femmes de pouvoir s’accentua. On vit des lobbyistes agir auprès des politiques afin de leur faire comprendre qu’ils étaient garants de l’avenir des branches industrielles ou qu’ils étaient responsables d’un effondrement de l’autonomie et de la connaissance des sciences. On vit des discours de défense se développer pour contrer le soft power de pays comme la Chine.
La [France gagnerait] à prendre en compte dans [ses] futurs choix de société et politiques [que le] pouvoir industriel a beaucoup changé dans ses méthodes et ses structures ces 40 dernières années.
De même, des accords officieux liés à une prise en compte des labos auprès des étudiants commencèrent à être débattus ; tout cela pour un intérêt mutuel.
On vit les entreprises renforcer leur promotion grâce aux études multicentriques dans le cadre de la commercialisation et de l’obtention de nouveaux AMM (2). Cette promotion auprès des CHU et des médecins universitaires se renforcera surement.
Ce pouvoir industriel a beaucoup changé dans ses méthodes et ses structures ces 40 dernières années. L’industrie pharmaceutique internationale (majoritairement anglo-saxonne maintenant, et pluri-continentale bientôt, la France étant, elle, reléguée) a un impact réel sur les deux autres pouvoirs en France et en Europe. Et les trois ont une action synergique que les Français gagneraient à prendre en compte dans leurs futurs choix de société et politiques.
Index :
Epu : enseignement post universitaire
Amm : autorisation de mise sur le marché